Gast Waltzing ©Sylvain Munsch_2014

Gast Waltzing

Musicien par vocation 

Gast Waltzing ©Sylvain Munsch_2014
Gast Waltzing ©Sylvain Munsch_2014

Si le jazz est en pleine éclosion au Luxembourg, c’est grâce à des musiciens comme Gast Waltzing. Trompettiste, compositeur et professeur, ce jazzman luxembourgeois vit son rêve au quotidien. Esquisse de sa carrière et de son univers musical.

Influencé par Miles Davis, véritable légende du jazz, Gast
Waltzing a toujours su qu’il n’y aura que la musique et rien
d’autre qui le ferait vibrer. Tout petit, il prend goût à la musique.
« A 5 ans, je suivais le cortège de la fanfare d’Useldange avec mon
petit tambourin, mais je me faisais chasser (Rires) … j’étais trop
jeune ». Deux ans plus tard, Gast pouvait enfin suivre les
cours de solfège au Conservatoire à Diekirch et commencer à
développer son talent. Comme tous les parents, ceux de Gast
s’inquiétaient aussi du parcours professionnel que leur fils
voulait à tout prix entamer. A l’époque, on intégrait la musique
militaire ou le professorat. Personne n’aurait eu l’audace de
penser à une carrière internationale dans le domaine de la
musique. Mais Gast était déterminé à poursuivre son rêve
envers et contre tout.

Un apprentissage semé d’épisodes mémorables
A 12 ans, il s’entiche du groupe de Blood Sweat & Tears qui lui
fera prendre conscience de sa passion pour le jazz. Quelques
années plus tard, à 16 ans, le jeune homme intègre le
Conservatoire Royal de Bruxelles pour se dédier complètement
à la musique. Il y réussit le concours pour rejoindre l’orchestre
symphonique flamand dans lequel il restera deux ans.
« J’ai vite compris que je ne serai jamais trompettiste dans un
orchestre » confie-t-il. « Cela ne me correspond pas, ce n’est
pas mon caractère d’attendre et d’attendre pour pouvoir jouer
une petite note de temps à autre. » Et pour cause, Gast était
destiné à briller et non pas à se fondre dans une masse. Une
expérience qui le marquera et qui l’aidera à trouver sa voie.
Après son passage en Belgique, il met le cap sur Paris où il
poursuit ses études au Conservatoire National Supérieur de
Musique et de Danse. A cette époque, il a l’énorme chance
de rencontrer le trompettiste français Maurice André et de
pouvoir jouer deux concertos avec lui. Un épisode qui sera
également décisif pour son parcours. « J’avais une sacrée
trouille ! » se remémore-t-il. En plus, « j’étais conscient que je ne serai jamais aussi bon que lui, parce qu’il était tout simplement
exceptionnel ! Nous devions jouer certains morceaux ensemble,
et ce qui était vraiment admirable, c’est que lorsqu’on jouait à
deux, il se mit à mon niveau ! Il aurait facilement pu m’anéantir,
mais il ne l’a pas fait. C’est là que j’ai compris que les Grands ne
t’écrasent pas, parce qu’ils n’en ont tout simplement pas besoin.
En fait, il veillait à ce que nous sonnions bien ensemble, il ne
cherchait pas à se mettre en avant. Lorsqu’il jouait des morceaux
en solo avec l’orchestre, j’entendais bien qu’il était à 100 % et
quand nous jouions à deux, il jouait avec plus de modération. Ça,
c’est de la grandeur ! »
Sur son expérience en tant que tête d’orchestre, il ne fait que
s’enthousiasmer. « La meilleure place au monde, c’est celle
du chef d’orchestre ! C’est impressionnant et émouvant lorsque
l’orchestre te suit, quand tout marche, tout s’harmonise. Quand
tu les diriges, tu peux changer les couleurs pendant le concert, c’est
énorme ! C’est un échange basé sur une confiance mutuelle. Il en
faut pour que cela fonctionne et quand cela marche, c’est tout
simplement génial ! Je pense bien que c’est une des expériences les
plus marquantes de mon parcours. »

Le professorat, plus qu’un gagne-pain, une bénédiction
Vivant au gré des concerts, Gast Waltzing se rend compte
que le métier de musicien n’arrivera pas à lui fournir le pain
quotidien. Quand ses parents l’appellent et lui annoncent
que la place de son ancien professeur au conservatoire se
libère, il décide de tenter le coup. Il se présente aux examens,
ils étaient six candidats à l’époque. « Je l’ai réussi et je n’ai
jamais regretté. » C’est ainsi qu’en 1982, il devient professeur
de trompette au Conservatoire du Luxembourg et qu’il fonde
le département du jazz en 1986, dont il est le chef depuis.
« Je n’aurai jamais pu faire les différents labels, ni les musiques
de films ou de séries télévisées sans pouvoir me reposer sur mon
travail au conservatoire. Cela me donne une grande liberté et des
moyens d’action considérables. »

Gast Waltzing ©Sylvain Munsch_2014
Gast Waltzing ©Sylvain Munsch_2014

Quand le hasard fait bien les choses
La composition est venue au fil du temps, c’est quelque
chose qui se travaille et qui se perfectionne au compte-goutte.
Pour écrire, il ne suffit pas d’être inspiré, bien au contraire.
« 5% d’inspiration, 95% de travail. L’inspiration, il ne faut pas
l’attendre, car on peut l’attendre longtemps » confirme Gast.
Et pourtant, son talent reste remarquable, car avant même
de rédiger la première note, le musicien a déjà toute la
composition en tête – de A à Z. « Il y a des gens qui cherchent,
qui se mettent au piano, expérimentent et trouvent. Moi,
j’entends la musique dans ma tête, l’entièreté de la composition
avant même de la noter. Il faut que je l’aie complètement en tête
avant de pouvoir commencer à l’écrire. » La composition, c’est
tout un art. Gast s’en est rendu compte lors de ses études à
Bruxelles. « J’avais remarqué que ceux qui réussissaient dans la
branche, étaient ceux qui écrivaient eux-mêmes leurs compos. »
L’opportunité d’écrire sa première musique de film ne tardait
pas à venir. Un jour Andy Bausch et Armand Strainchamps
l’appellent et lui demandent de faire la musique pour leur
film « A Wopbopaloobop A Lopbamboom ». « Je n’avais jamais
écrit de musique de film, mais j’étais jeune, avide et con et j’ai
dit oui. » avoue-t-il en rigolant. « Qui ne tente rien, n’a rien. Et
parfois, la chance vous sourit ! » Ce coup du destin lui vaudra
d’être récompensé par le Prix du Meilleur Compositeur aux
European Film Music Awards en 1989.
Puis les contrats s’enchaînent. Marco Serafini l’introduit dans
la série télévisée « Der Millionaire » pour laquelle il composera la musique pour 26 épisodes. « C’était la meilleure leçon que
l’on aurait pu avoir et en plus, à l’époque, on travaillait encore
sur Atari » précise-t-il. Un bon exercice et une corde de plus à
son arc. Suit alors « Küstenwache », série pour laquelle il est
actif depuis 1996 jusqu’à nos jours. « Si on écrit de la musique
pour des films ou des séries télévisées, il faut savoir tout faire, être
polyvalent. Ecrire pour le grand orchestre, c’était encore autre
chose. Au début, j’avais peur, parce que je ne l’avais jamais fait
auparavant. Et puis on s’y met et à force, on y trouve son pied ! »
En tout, Gast Waltzing aura écrit (jusqu’à l’heure actuelle)
plus de 210 compositions pour films et séries télévisées. Il a
fait 5 tournées en Chine, il est partit à plusieurs reprises au
Japon, pays qu’il adore. En octobre dernier, il s’est produit au
Qatar et vient de revenir de New Orleans où il a enregistré son
dernier album.
Être musicien, c’était le rêve ultime de Gast Waltzing et il s’est
exaucé. Il a fait une carrière remarquable et son aventure est
loin d’être terminée. Mais le chemin pour y arriver est parfois
dur, mais révélateur. « Tu souffres dans notre métier, car c’est
quelque chose de personnel. On te critiquera toujours. Il faut en
être conscient. Tu essaies de plaire et quand cela ne plaît pas, et
bien, ça fait mal. C’est un métier où il ne faut surtout pas avoir
d’hésitations. Il faut être un peu arrogant, dans le bon sens,
évidemment, sinon on ne peut pas survivre dans ce métier. » Son
parcours semé de récompenses et de belles compositions en
sont la preuve qu’un peu d’arrogance ne nuit pas et que la
persévérance paie. Nous attendons la suite avec impatience !

www.waltzingparke.com

Article par Anne Grulms

Photos par Sylvain Munsch

Article paru dans le magazine Made in Luxe 100% Passionné – Mars-Avril 2014

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